Some hours with the witches.
C'est une drôle de maison. Une maison biscornue, des escaliers étroits, qui tournent, partout, des étages secrets, des poutres colorés qui grincent, un parquet poussiéreux. Une cage en métal cabossée dans laquelle sont enfermés quelques bouteilles d'alcool poussiereuses, mais pas des alcools d'ici. Des potions; Des objets incongrus partout. Une drôle d'ambiance excentrique et mystique.
Parce que Priscille est une sorcière. Ses cheveux bouclés pas tout à fait coiffés, son grain de beauté sous la lèvre inferieure, ses yeux noirs, ses petites chaussures qui font clac clac sur le carrelage, son omelette baveuse. Quelques heures chez les sorciers, étranges, alcoolisés.
Nous n'étions evidemment pas les bienvenus. Nous sommes passés maitres dans l'art de s'imposer chez les autres. Nous sommes passés maïtres de l'impolitesse et du bruit. Mes lèvres avalent gouluement les alcools divers, mes narines se posent regulierement sur le petit bocal de verre foncé, hûment les vapeurs qui réchauffent et font rire. On est tous d'accord, c'est un truc de tapette. Mais pourquoi pas.
Plus tard dans la nuit, aprés avoir redécoré une pauvre clio qui n'avait rien demandé, plus tard dans la nuit, plus tard.. Des pas qui se collent aux miens, et le bruit angoissant qui ne les quitte jamais. Accelerer le pas comme on peut, mais. Le ventre, la tête, ne veulent plus suivre. Ca va? Bien sur que ça va. Mais retournes-toi, tu ne les vois pas? Moi je les vois, moi je les entends. Non ils ne sont pas menaçants, et non nous n'avons rien à craindre. Mais le bruit de leurs pas, et leurs questions qui fusent, et tout le reste qui flotte dans l'air, et le petit bocal de verre qui passe de main en main, et la bouteille que je brandis comme seule arme dérisoire, et mes pas qui s'accélèrent encore, mais jamais assez, et la vie qui continue, et le monde trop aveugle pour voir qu'il se passe quelque chose. Et puis, le big bang. La tour qui s'envole, le vent, les cheveux, le sable. Vous ne voyez rien? Non. D'accord. Ca va passer. Et en effet. Ca passe.
Trick or treat ? Treat, comme il se doit.
Tchaikovski : Le lac des cygnes.